Sur ce thème, pas besoin d’en faire des tartines. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. La littérature scientifique nous les fournit en grand nombre, et tous pointent dans la même direction, à savoir que la déficience en vitamine D s’apparente désormais à une véritable pandémie dont le seul tort est d’être silencieuse et donc largement ignorée du grand public et même, dans une certaine mesure, du corps médical. D’où l’appel, au printemps 2010, de 40 scientifiques internationaux, dont le Dr David Servan-Schreiber, pour sensibiliser les médecins à l’importance de la vitamine D. D’où aussi ce modeste blog, lancé à l’automne 2010, pour tenter d’alerter le plus grand nombre possible d’internautes sur les conséquences pour la santé d’une déficience chronique en vitamine D.
Mais revenons aux chiffres, édifiants, implacables, qui achèveront de vous faire prendre conscience de l’ampleur du problème :
> 1995, France : mesure du taux sanguin de 126 patients institutionnalisés (âge moyen : 84 ans). Résultat : déficience en vitamine D dans 100 % des cas.
> 1997, France : mesure du taux sanguin de 1579 sujets en bonne santé âgés de 35 à 60 ans. Résultat : déficience en vitamine D dans 78 % des cas.
> 2001, Région parisienne : mesure du taux sanguin de 280 sujets en bonne santé âgée de 60 à 79 ans. Résultat : déficience en vitamine D dans 88 % des cas.
> 2005, Écosse : mesure du taux sanguin de 548 patients de plus de 60 ans pendant 4 ans. Résultat : déficience en vitamine D dans 97,8 % des cas. À noter que dans 25 % des cas, les taux étaient même si bas qu’ils étaient non mesurables !
> 2005, Floride : malgré une situation géographique assez favorable, une étude montre qu’au cours de la période hivernale, 38 % des hommes et 40 % des femmes ont un taux sanguin de vitamine D inférieur à 20 nanogrammes par millilitre (20 ng/ml), soit le signe d’une déficience marquée. Pour rappel, un taux situé entre 20 et 29 ng/ml signale une déficience modérée, alors qu’un taux situé entre 10 et 19 ng/ml indique une déficience marquée. Enfin, en-dessous de 10 ng/ml, il ne s’agit plus d’une simple déficience mais d’une carence avérée.
> 2006, Europe : mesure du taux sanguin de 8532 femmes européennes ménopausées âgées d’au moins 48 ans. Résultat : déficience en vitamine D dans près de 80 % des cas et même dans 90 % des cas si l’on ne prend en compte que les seules participantes françaises à cette étude ! À savoir : la baisse des oestrogènes a une incidence négative sur le fonctionnement des enzymes nécessaires à la transformation et l’activation de la vitamine D à l’intérieur de l’organisme.
> 2007, Suisse : mesure du taux sanguin de 222 patients de plus de 65 ans hospitalisés à Zurich pour une fracture du col du fémur. Résultat : seules 4 % des personnes hospitalisées ne présentaient pas de déficience en vitamine D ! À mettre en parallèle avec le fait que seules moins de 10 % de ces personnes s’étaient vus préalablement recommander une supplémentation en vitamine D ! (1)
> 2007, Angleterre : mesure du taux sanguin de 7437 sujets de race blanche âgés de 45 ans. Résultat : déficience observée chez 87,1 % des participants au cours de l’hiver et du printemps. La proportion des déficients passe seulement à 60,9 % au cours de l’été, période pourtant la plus favorable.
> 2007, Liban : une étude montre qu’une majorité des femmes de ce pays sont déficientes en vitamine D et que cela s’observe principalement chez les femmes… voilées !
> 2009, Rhône-Alpes : une étude conduite sur 196 femmes jeunes montre que 96 % des participantes sont déficientes en vitamine D au cours de l’hiver.
> 2009, États-Unis : étude de l’évolution du statut en vitamine D de la population américaine (tous âges confondus). Résultat : en 1994, 55 % de la population était déficiente en vitamine D ; en 2004, cette proportion est passée à 77 %, soit une dégradation très nette en l’espace de 10 ans. Cela a t-il provoqué une prise de conscience salvatrice au sein du corps médical ? Que nenni ! Deux études publiées en 2010 dans la revue Pediatrics font ressortir que malgré l’importance de la déficience généralisée des enfants américains en vitamine D, la plupart des pédiatres continuent à ignorer le problème ! L’étude réalisée par des chercheurs du CDC a révélé que seuls 5 à 13 % des enfants allaités recevaient 400 UI/j de vitamine D, soit les apports quotidiens minimaux actuellement recommandés par l’American Academy of Pediatrics. Histoire de noircir un peu plus le tableau, l’étude du CDC dévoile également que seuls 1 à 13 % des enfants de moins d’un an prennent un supplément de vitamine D.
Si l’on s’en tient aux données fournies par cette série d’études, la liste des premiers bénéficiaires d’une supplémentation en vitamine D se dégage clairement. Elle comprend les bébés, les personnes âgées (avec une attention particulière pour celles placées en institution) et les femmes en géneral (avec une attention particulière pour celles qui sont enceintes, allaitantes et ménopausées). Plus largement, les populations vivant dans les pays de l’hémisphère Nord devraient davantage se préoccuper de leur statut en vitamine D. La prochaine fois, nous détaillerons les groupes de population à risque de déficit en vitamine D.
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Note :
(1) Plus on vieillit, plus le statut en vitamine D a tendance à se dégrader. Avec l’âge, la peau devient plus fine et la synthèse cutanée s’avère par conséquent de plus en plus difficile. Une personne de 70 ans synthétise ainsi quatre fois moins de vitamine D qu’une personne jeune. Le vieillissement s’accompagne aussi d’une diminution du potentiel enzymatique. Cela a des incidences à de multiples niveaux. On s’est ainsi aperçu que l’enzyme chargée de transformer la vitamine D en vue de la rendre active ne fonctionnait plus de manière optimale. La supplémentation ne remédie pas entièrement au problème dans la mesure où elle n’apporte à l’organisme que de la vitamine D sous sa forme inactive. Cela remet-il pour autant en cause l’intérêt d’une supplémentation ? Non, parce que ses effets positifs sont avérés, en particulier l’effet anti-fracturaire (réduction du risque de fracture chez les sujets de plus de 50 ans et plus particulièrement chez ceux de plus de 70 ans).
source: vitamined