Dépression : ce n’est pas votre sérotonine

Des millions de personnes croient que la dépression est causée par une « carence en sérotonine », mais qu’en est-il réellement de la science qui soutient cette théorie ?

La théorie de la sérotonine remise en question

Depuis des décennies, on nous présente la dépression comme étant le résultat d’un déséquilibre chimique, souvent centré sur la sérotonine. Des publicités pour des antidépresseurs, telles que celles promouvant le Zoloft, avancent cette idée : « La dépression est une affection grave qui peut être due à un déséquilibre chimique, et Zoloft permet de corriger cet état. » Pourtant, malgré plus de 60 ans de recherches, cette théorie n’a jamais réellement gagné en crédibilité scientifique. Selon une analyse des travaux sur la dépression, aucune étude n’a pu établir de manière fiable une carence en sérotonine comme étant la cause du trouble dépressif.

Un manque de preuves scientifiques

Pour comprendre ce que pourrait être un « déséquilibre chimique », il faudrait d’abord savoir ce que serait un état de « balance chimique » dans le cerveau. Or, la neuroscience actuelle n’a pas encore réussi à caractériser ce qu’est un état cérébral optimal. Une étude publiée dans le New England Journal of Medicine sur la dépression majeure souligne qu’aucune des recherches sur les métabolites de la sérotonine et de la noradrénaline dans divers fluides corporels n’a pu identifier une carence de manière consistante chez les patients souffrant de dépression.

Le Dr. Thomas Insel, ancien directeur du National Institute of Mental Health (NIMH), a également remis en cause l’efficacité des approches basées sur la génomique et l’imagerie cérébrale. Selon lui, ces techniques n’ont pas encore permis d’améliorer le diagnostic ou le traitement des millions d’Américains touchés chaque année par des troubles mentaux modérés ou graves.

La naissance d’un mythe puissant

L’idée que la sérotonine pourrait être liée à la dépression a des origines très modestes. Dans les années 1950, un médicament appelé la réserpine, utilisé contre les convulsions, avait été observé pour ses effets sur la sérotonine dans le cerveau, conduisant à des états de léthargie chez certains sujets. Peu de temps après, un traitement antituberculeux, l’iproniazide, a été associé à des améliorations de l’humeur chez des patients après plusieurs mois de traitement. Ces observations ont poussé certains chercheurs à émettre l’hypothèse d’une corrélation entre la sérotonine et les troubles de l’humeur, une hypothèse formalisée dans les années 1960 avec la théorie des catécholamines du Dr. Joseph Schildkraut. Toutefois, il a lui-même précisé que cette théorie ne reposait que sur des modèles induits par des médicaments et non sur une compréhension directe des mécanismes naturels de la dépression.

Cette théorie a néanmoins prospéré dans un contexte où la psychiatrie cherchait à se redéfinir et à s’éloigner d’approches plus radicales comme la lobotomie. Le secteur pharmaceutique s’est empressé de s’associer à cette redéfinition, donnant naissance à un modèle basé sur des médicaments, comme l’explique le Dr. Joanna Moncrieff. Ce modèle ne repose pas sur une véritable guérison des patients, mais sur la simple observation que certains produits chimiques synthétiques peuvent modifier le comportement.

Les effets des antidépresseurs : une illusion de traitement ?

Les antidépresseurs, bien qu’efficaces pour provoquer des changements dans le comportement, ne réparent pas réellement un soi-disant déséquilibre chimique dans le cerveau. Le Dr. Irving Kirsch, un expert sur l’effet placebo, a démontré dans une méta-analyse que seulement 27 % des réponses thérapeutiques aux antidépresseurs pouvaient être attribuées à l’action réelle du médicament. D’autres études ont montré que les différences entre les antidépresseurs et les placebos disparaissent lorsqu’on utilise des placebos « actifs », c’est-à-dire des placebos qui imitent certains des effets secondaires des médicaments.

En parallèle, une étude financée publiquement à hauteur de 35 millions de dollars, qui a suivi 4 000 patients sous traitement antidépresseur, a révélé que, quel que soit le médicament utilisé ou la stratégie adoptée pour traiter la dépression, les taux de rémission restaient faibles (environ 18 à 30 % des patients). Ce constat remet en cause l’idée que ces traitements apportent une solution durable et efficace aux troubles dépressifs.

Une industrie qui profite du doute

Les entreprises pharmaceutiques ont habilement utilisé cette théorie partielle pour générer des profits en orientant la recherche et en manipulant les données scientifiques. Une étude célèbre publiée dans le New England Journal of Medicine en 2008 a révélé que sur les 74 études utilisées pour approuver 12 antidépresseurs, les études montrant des résultats négatifs étaient souvent soit non publiées, soit présentées sous un angle favorable aux médicaments.

Alternatives aux traitements conventionnels

Alors que la théorie de la sérotonine perd en crédibilité, il est essentiel de réévaluer notre approche des troubles dépressifs. Des traitements plus holistiques, tels que les changements de régime alimentaire, l’exercice, la méditation et la détoxification de l’environnement, peuvent offrir des alternatives plus sûres et potentiellement plus efficaces.

Source: greenmedinfo.com