Le venin d’abeille permet de tuer les cellules cancéreuses du sein

Le Dr Ciara Duffy, de l’Institut de recherche médicale Harry Perkins et de l’Université d’Australie occidentale, a réalisé une étude révolutionnaire sur les effets du venin d’abeille contre divers sous-types de cancers du sein, dont le cancer du sein triple négatif, l’une des formes les plus difficiles à traiter. Cette étude a révélé que le venin d’abeille, et en particulier l’un de ses composants actifs, la mélittine, peut rapidement détruire les cellules cancéreuses, notamment celles du cancer du sein triple négatif et celles enrichies en HER2.

Objectifs et méthodologie de l’étude

L’objectif de cette recherche était d’explorer les propriétés anticancéreuses du venin d’abeille et de la mélittine, un peptide composé de 26 acides aminés, contre plusieurs types de cellules cancéreuses du sein. Le Dr Duffy a mené des expériences sur le venin de 312 abeilles et bourdons prélevés en Australie occidentale, en Irlande et en Angleterre. Cette étude s’est distinguée en comparant les effets du venin sur les sous-types de cancer du sein (positif aux récepteurs hormonaux, enrichi en HER2 et triple négatif) ainsi que sur des cellules mammaires normales.

Une des découvertes majeures est que la mélittine, lorsqu’elle est synthétisée en laboratoire, a reproduit la majorité des effets anticancéreux observés avec le venin naturel. Duffy et son équipe ont ainsi testé l’efficacité du venin d’abeille et de la mélittine sur plusieurs sous-types de cancers, tout en préservant les cellules saines environnantes.

Destruction rapide et ciblée des cellules cancéreuses

L’étude a montré que la mélittine, composant clé du venin d’abeille, réduit de manière significative et rapide la viabilité des cellules cancéreuses du sein, notamment celles des cancers triple négatif et enrichis en HER2. Ces formes de cancers sont connues pour leur agressivité et la difficulté de les traiter avec les options médicales existantes.

Les effets de la mélittine se sont révélés particulièrement puissants : elle a perturbé les messages chimiques au sein des cellules cancéreuses, essentiels à leur croissance et division. En seulement 20 minutes, elle a considérablement réduit ces signaux. Duffy a également observé que la mélittine pouvait complètement détruire la membrane des cellules cancéreuses en 60 minutes, ce qui en fait un outil extrêmement prometteur pour une destruction ciblée et rapide des tumeurs.

Effet sur les voies de signalisation et synergie avec la chimiothérapie

La mélittine a un mode d’action unique sur les cellules cancéreuses. Elle interagit avec les voies de signalisation, bloquant les récepteurs suractivés dans certains types de cancers, comme le récepteur du facteur de croissance épidermique, qui est souvent surexprimé dans le cancer du sein triple négatif. Elle inhibe également HER2, un récepteur surexprimé dans les cellules cancéreuses enrichies en HER2. Ces récepteurs jouent un rôle crucial dans la prolifération des cellules cancéreuses, et leur suppression empêche la réplication rapide des cellules tumorales.

Duffy a aussi étudié la possibilité d’utiliser la mélittine en combinaison avec des traitements existants comme la chimiothérapie. En formant des pores dans les membranes des cellules cancéreuses, la mélittine permet aux médicaments de chimiothérapie de pénétrer plus facilement à l’intérieur des cellules, augmentant ainsi leur efficacité. Des essais sur des souris ont montré que l’association de la mélittine et du docétaxel, une chimiothérapie couramment utilisée, réduisait considérablement la croissance tumorale. Cette approche combinée pourrait ouvrir la voie à des traitements plus efficaces pour les cancers agressifs.

Comparaison des populations d’abeilles et perspectives futures

Le Dr Duffy a également voulu comparer les effets du venin d’abeilles provenant de différentes régions, ainsi que ceux du venin de bourdon. Les résultats montrent que les abeilles de Perth, d’Irlande et d’Angleterre produisent des effets presque identiques sur les cellules cancéreuses du sein. Cependant, le venin de bourdon n’a pas été capable d’induire la mort cellulaire, même à des concentrations élevées. Cette différence souligne l’importance particulière du venin d’abeille dans ce domaine de recherche.

Il est intéressant de noter que les effets anticancéreux du venin d’abeille ont été mentionnés dès 1950 dans un article de la revue Nature, où il était déjà démontré que le venin d’abeille réduisait la croissance des tumeurs chez les plantes. Cependant, ce n’est que dans les vingt dernières années que l’intérêt scientifique pour le venin d’abeille dans le traitement du cancer a vraiment émergé.

Prochaines étapes et considérations

Bien que cette recherche soit prometteuse, des études supplémentaires sont nécessaires pour déterminer la méthode d’administration la plus efficace de la mélittine, ainsi que les doses maximales tolérées et les éventuels effets toxiques. Ces recherches futures permettront de mieux évaluer le potentiel de ce traitement dans la lutte contre le cancer du sein et d’autres cancers agressifs.

Les travaux du Dr Duffy, menés dans le cadre de son doctorat au sein de l’Institut de recherche médicale Harry Perkins, soulignent l’importance de continuer à explorer les solutions naturelles dans le traitement des maladies humaines. Comme l’a déclaré le professeur Peter Klinken, scientifique en chef à l’Université d’Australie-Occidentale : « Cette étude démontre comment la mélittine interfère avec les voies de signalisation dans les cellules cancéreuses du sein pour réduire la réplication cellulaire. Elle fournit un autre exemple merveilleux où des composés dans la nature peuvent être utilisés pour traiter des maladies humaines ».

Sources:
dx.doi.org
trustmyscience.com