Il est important de connaître les cellules de nos organes car c’est souvent à ce niveau que commencent les maladies. Connaître vos cellules, connaître leurs besoins, c’est le premier pas vers une prévention efficace.
Un renouvellement permanent
Les cellules des papilles de la langue se renouvellent tous les 10 jours et les cellules de l’odorat tous les 3 mois. (voir notre lettre : La merveilleuse histoire de votre palais des saveurs).
Vous le savez déjà, les premiers signes des maladies d’Alzheimer et de Parkinson sont la perte progressive du goût et de l’odorat.
Les cellules de l’œsophage se renouvellent toutes les semaines. Elles n’ont pour rôle que d’humecter le conduit œsophagien dont les parois sont lisses, appliquées l’une contre l’autre : cela permet d’aider à la descente des aliments longuement mastiqués, broyés, goûtés dans notre “palais des saveurs” et prêts à être digérés dans l’estomac.
Les cellules de l’estomac, destinées à fabriquer le liquide gastrique acide pour la deuxième phase de la digestion, après celle commencée dans la salive, ont une belle durée de vie. Elle peut atteindre une année.
La magie du foie ! Les cellules du foie, dites hépatocytes, se renouvellent régulièrement mais ont une durée de vie beaucoup plus longue que les globules rouges ou blancs. Elles peuvent vivre jusqu’à une année, et même jusqu’à 500 jours. Ainsi, une personne de 50 ans a pratiquement refait son foie une cinquantaine de fois. Évidemment, cela est vrai dans la mesure où ce foie n’a pas été intoxiqué par l’alcool, la drogue ou trop de sucres transformés en gras, responsables de « foie gras » dénommé scientifiquement « stéatose hépatique ». Le foie est capable de se régénérer. On le sait depuis le mythe de Prométhée, puni par Zeus et condamné à se faire dévorer éternellement le foie durant le jour tandis qu’il se régénérait la nuit.
Je l’ai vérifié autrement : après une intervention chirurgicale enlevant jusqu’à 80 % de la masse hépatique totale (1500 grammes, soit 2 % du poids du corps), les 20 % restant sont capables de régénérer complètement et donc de reconstruire en 6 mois tout le foie à partir de ce qu’il en reste.
Étonnant pancréas ! Les cellules du pancréas se renouvellent aussi. En effet, après une inflammation aiguë bénigne du pancréas, on observe une restitution ad integrum de sa structure démontrant la capacité de régénération. En mai 2013, une équipe de Harvard a démontré qu’une hormone était capable de stimuler les cellules “dormantes” du pancréas fabriquant l’insuline. Le chercheur étant chinois et sa découverte intervenant dans l’année du lapin, il a d’abord nommé cette hormone “lapin” avant qu’elle ne devienne logiquement bétatrophine, car capable de stimuler la multiplication et les fonctions des cellules béta du pancréas.
Est-ce en perspective la fin de l’insuline dans les diabètes de type II ? Peut-être, mais il est trop tôt pour l’affirmer.
L’intestin : le sélectionneur et gardien principal ! Les cellules de l’intestin grêle (entérocytes) se renouvellent très vite, tous les 2 à 5 jours. Chaque minute, un million de cellules sont renouvelées. Ce phénomène de renouvellement s’appelle l’entéropoièse, mot copié de la formation des globules du sang dans la moelle osseuse, nommé hématopoïèse. Les entérocytes laissent passer, absorbent les micronutriments préparés par la digestion et fabriquent des immunoglobulines A, anticorps chargés de la protection de la muqueuse intestinale. D’autres cellules intestinales, les cellules dites de Paneth, chargées de répondre aux antigènes bactériens présents dans le tube digestif ont une durée de vie d’une vingtaine de jours.
L’énergie princeps des cellules intestinales est un acide aminé spécifique : la glutamine. C’est lui qui peut aider à la cicatrisation de la maladie responsable de la porosité intestinale, que les Américains nomment leaky gut, laquelle se traduit par un « déserrement » des jonctions serrées qui normalement collent les cellules intestinales entre elles. Le meilleur apport de glutamine que je connaisse aujourd’hui pour les patients atteints de porosité intestinale est le Perméa Régul [1] qui contient 1500 mg de glutamine par sachet. Il y a aussi Ergyprotémyl de Nutergia qui contient 560 mg par trois sachets.
Le côlon, laboratoire des déchets. Les cellules du côlon, colocytes ou colonocytes se renouvellent tous les 4 à 6 jours. Leur énergie leur est fournie par les acides gras à chaînes courtes, le butyrate surtout mais aussi le propionate et l’acétate.
La plupart des nutriments qui parviennent au côlon vont subir la fermentation bactérienne. Ce sont les bactéries du côlon qui utilisent les fibres des aliments incomplètement digérés comme source d’énergie. Les acides gras à chaînes courtes constituent le produit final du travail des bactéries. Mieux valent ces acides gras fabriqués naturellement dans notre tube digestif que ceux apportés en lavement et qui n’ont pas encore fait leur preuve.
Même notre prostate est soumise à renouvellement ! Les cellules normales de la prostate ont une durée de vie d’environ 2 à 3 mois, si la prostate n’est pas enflammée par une infection (prostatite) ou par des facteurs de croissance qui ne lui sont pas normalement destinés, responsables d’adénome et même de cancer. Alimentation de veau, prostate de veau !
Les cellules de la peau ont une durée de vie de seulement 28 jours.
Les spermatozoïdes, pas avant la puberté, proviennent de cellules souches spécialisées nommées spermatogonies. Elles sont fabriquées par les cellules de Sertoli [2] présentes dans les testicules de l’embryon, elles sont inactives jusqu’à la puberté, bloquées par une substance qui a pu être identifiée : la MIS, pour Meiotic Inhibitor Substance.
À partir de la puberté, c’est la « spermatogénèse » qui démarre. La première spermatogonie “A” se divise en deux cellules, l’une va donner 16 spermatozoïdes, mais elle met entre 64 et 70 jours en passant par 3 stades (spermatogonie “B”, spermatocyte I puis II, puis spermatide et enfin spermatozoïde) pour devenir capable de féconder un ovule, tandis que l’autre cellule, la spermatogonie B, maintient le stock en cellules souches spermatogonies. À l’âge adulte, la cellule de Sertoli fabrique 1500 spermatogonies par seconde.
Les ovaires, dès la naissance, contiennent un nombre déterminé d’ovocytes, plusieurs milliers et, ce qui est une découverte récente, les ovaires sont capables d’en produire de nouveaux. Dès la puberté, chaque mois, une dizaine d’ovocytes se développent pour aboutir à l’ovulation d’un seul, pouvant être fécondé par un spermatozoïde. Les autres disparaissent naturellement.
Même les cellules de la rétine qui appartiennent à une membrane très fine de 0,5 mm d’épaisseur, constituée de différentes couches de cellules, dont les plus sensibles à la lumière ont des photorécepteurs : « environ 5 millions de cellules cônes (vision diurne et colorée) et 120 millions de cellules bâtonnets (vision crépusculaire et nocturne en noir et blanc), qui captent les signaux lumineux (photons) et les transforment en signaux électrochimiques. Elle se compose aussi de neurones qui, à leur tour, intègrent ces signaux chimiques (neurotransmetteurs) en signaux électriques à l’origine de potentiels d’action qui passent via les nerfs optiques vers le cerveau postérieur, dit occipital. »
On pensait qu’il n’existait pas de cellules souches dans la rétine. C’est autour de l’an 2000 qu’on a démontré que des cellules des bords de la rétine, extraites et mises en culture, peuvent former des cellules photo-réceptrices. L’espoir est donc grand de trouver des solutions pour neutraliser les maladies neuro-dégénératives de l’œil [3].
Nous pouvons gagner ou perdre des neurones. Les cellules du cerveau, heureusement, se renouvellent aussi. Je raconte souvent en conférence le premier contact avec cette belle science des cellules du corps humain qu’on appelle la « cytologie ». Nous avions avec mes camarades 17 ou 18 ans et notre professeur nous fait savoir : « les petits, à partir de 20 ans vous allez perdre 20 000 à 30 000 neurones chaque jour ». En le regardant, il avait mon âge actuel, je me suis demandé intérieurement « combien il lui en reste ? ». À la fin du cours, je suis allé lui demander : « Maître, qui a dit cela : nous perdrons tant de neurones chaque jour ? Je suis de nature économe, je sens bien qu’ils sont utiles, les neurones, comment ne pas les perdre ? » Il m’a répondu « C’est le prix Nobel de 1906 qui l’a dit, Ràmon Y Cajal. Petit, tu les perdras ! ».
Je ne pouvais pas contester le maître, mais aujourd’hui je sais que le maître et le prix Nobel se sont trompés. Non seulement nous ne les perdons pas, les neurones, mieux encore : nous pouvons en gagner. Il faut pour cela les faire travailler.
Vous comprenez pourquoi, depuis 20 ans, la télévision a disparu de la maison. Sans la voir j’en sais autant que ceux qui la regardent 3h50 par jour : les Français ont le record en Europe en ce domaine et les Américains une heure de plus ! Évidemment TF1, France 2 et les autres chaînes ne vous diront pas qu’elles vous aident à avoir un bon Alzheimer… car avec la télé, il n’y aucune interactivité, vous gobez les informations-déformations qui vous conditionnent, vous endorment, vous anesthésient gentiment.
Nous pouvons donc gagner des neurones sans la télé. Chaque jour, chez la souris, 30 000 neurones migrent vers le bulbe olfactif, zone essentielle de ce sens majeur qu’est l’odorat. En plus, 9000 neurones migrent vers l’hippocampe, zone primordiale de la mémoire de l’animal comme de l’humain. Malheureusement, une grande partie de ces neurones vont mourir s’ils ne trouvent pas les bonnes connexions avec le réseau neuronal. Chez la souris, 50 % des nouveaux neurones du bulbe olfactif disparaissent en deux mois et jusqu’à 60 % dans l’hippocampe.
C’est exactement ce que l’on observe chez l’homme ou la femme dont le système nerveux de la mémoire n’est pas activé : mémoire olfactive (odeur des fleurs : offrez plus souvent des roses bio à votre compagne) et mémoire gustative en particulier, lorsque nous oublions de stimuler notre palais des saveurs en avalant les aliments comme les animaux, en les mastiquant a minima. De plus, très souvent les aliments sont trop cuits, ils perdent leur couleur, leur odeur et leur saveur.
Les cellules osseuses de 10 ans en 10 ans ! Elles sont de deux types : les ostéoblastes et les ostéocytes. Les premiers construisent la trame osseuse. La minéralisation dure en moyenne 10 à 20 jours. Les ostéoblastes sont destinés à devenir des ostéocytes, lesquels ne sont pas capables de se diviser. Leur durée de vie est de 10 ans. Les ostéocytes s’accumulent dans une logette ovalaire nomméeostéoplaste. L’ostéocyte est capable d’élaborer des métabolites de l’osseine [4] qui se minéralise ensuite.
Mon cœur est plus jeune que moi, si… Finissons donc par les cellules du cœur, dites cardiomyocytes. Elles représentent 20 % des cellules cardiaques. Étonnant mais vrai, le muscle cardiaque qui lance chaque seconde le sang vers la tête et les pieds, et le récupère dans la même seconde, est capable de fabriquer de nouvelles cellules. Pendant toute une vie, près de 50 % de nos cellules cardiaques sont remplacées. On sait même qu’il s’agit de 1 % par an dès 25 ans, jusqu’à atteindre 0,5 % à 75 ans. Évidemment, tabac, alcool en excès et autres addictions peuvent nous aider à garder notre “premier cœur” sans possibilité d’atteindre le deuxième. Une vie raccourcie, une autre forme de suicide assisté par les lobbies qui sponsorisent Jeux Olympiques et coupes du monde.
Quant aux cellules souches et à leur pouvoir dit “insoupçonné”, nous en parlerons dans une prochaine lettre.
Bien à vous tous, à la semaine prochaine.
[1] Des laboratoires COPMED : 1/2 sachet pendant 10 jours dilué dans 200 ml d’eau tiède, puis 1 sachet entier les 20 jours suivants.
[2] Découvertes en Italie par Enrico Sertoli en 1865.
[3] La dégénérescence liée à l’âge (DMLA) est la première cause de malvoyance dans nos pays. Elle peut apparaître dès 50 ans, mais plus souvent après 65 ans, chez les anciens tabagiques et les personnes en surpoids.
[4] L’ostéine ou osséine constitue le tissu cellulaire de la peau, du cartilage et des os, elle est constituée à 95% de collagène laquelle est fait de protéines donnant aux tissus une résistance mécanique.
La Lettre du Professeur Joyeux est un service d’information indépendant sur la santé, spécialisé dans la prévention des maladies auprès du grand public et des familles. Rendez-vous ici pour vous inscrire gratuitement.
Eh oui c’est incroyable toute cette diversité dans notre corps.
C’est d’autant plus intéressant quand on sait qu’on peut naturellement améliorer la capacité de notre corps à produire plus de cellules réparatrices pour optimiser notre santé ! 😀